La vie du vannier - 1er épisode

Publié le par Zaza

Aujourd'hui, je viens de passer du temps avec Mamie qui m'a expliqué ce qu'était la vie du vannier au début du XIXème siècle, et en tant que Maître artisan vannier, elle sait de quoi elle parle...

L'Argonne a eu beaucoup de vanniers il y a quelques années, on pouvait en compter jusqu'à 500 dans le canton de Vouziers. De nos jours on ne les compte plus que sur les doigts d'une main..

Dans la zane entre Falaise et Olizy (petit coin de verdure), tout le long de l'Aisne poussaient les osiers, matière première du vannier.

Je vais donc vous relater notre après midi, au coin de l'âtre devant une galette des rois (eh oui de circonstance !), les explications sur la coupe et la préparation de l'osier ainsi que quelques anecdotes d'enfance... en patois argonnais par moment.

1- Coupe pour mise au fossé si celui-ci pas innondé :

Début février, Mamie s'en allait avec ses parents et d'autres vanniers dans les naux (champs d'osier ou oseraie) pour couper l'osier et le mettre en gros balots noués aveu une are (une are = ligature en osier très solide). Puis ils emmenaient les balots jusqu'à la route pour les charrier vers un ruisseau. Une fois dans le ruisseau, on l'égluait (nettoyait) pour enlever les glajots ded'an (sortes de roseaux ou herbes des marais qui se trouvaient au milieu du balot d'osier).

Les balots avaient une circonférence d'environ 60 cm. Après égluage, on en faisait des petits paquets d'environ 20 cm de diamètre que l'on mettait dans le fossé avec des piquets et des barres de bois de chaque côté du ruisseau, sur une longueur 1.50 m, sur une épaisseur de 2 à 3 rangées maxi, ligaturés tous les 1.50 m entre eux aux montants pour éviter qu'ils ne partent si l'eau venait à monter.

De cette façon on pouvait alors attendre la montée de la sève pour pouvoir plumer l'osier le moment venu.

2- Coupe avec montée en sève :

Suivant le temps, les races d'osier (comme ci-dessus en photo "Le rouge de Falaise"), l'année, la sève monte plus ou moins rapidement. Dès que l'osier est coupé, il est plumé avec une machine à plumer ou un "triffu" (machine ancestrale fabriquée à Vandy).

L'osier ainsi plumé, appelé osier blanchi, était installé dans un champs sur des piquets et barres d'étendage pour le séchage, en étant bien coincé pour éviter qu'il ne s'envole avec les coups de vents.

L'osier séché était remis en balot aveu une are. On utilisait alors une batte qui servait à botteler le cul du balot pour l'égaliser et le resserrer pour que tout soit bien droit de haut en bas, c'est ce que l'on appelait l'opération de bottelage.

Quand l'osier en sève était fini de traiter, on s'occupait de l'osier mis au ruisseau et venu à maturité et ainsi de suite pendant des mois... Ces mois là étaient des mois sans salaire en ce temps là puisque pas de travail de vannerie à proprement parler d'où la dureté du travail de vannier et la disparition progressive de ce métier !

De même, les années de grèle, il n'y avait plus rien à faire qu'à attendre l'année suivante pour pouvoir travailler car l'osier n'était pas de bonne qualité, trop friable, d'où la survie difficile de ce métier considéré comme de l'artisanat de nos jours car un bon vannier faisait des journées de 15 heures minimum et le dimanche il fallait mouiller l'osier...

Comme dit Mamie, la Douce France n'a jamais été pour les vanniers en ce temps là ! Mamie me raconte que le meilleur pour elle lorsqu'elle était enfant c'était lorsque son père lui ramenait du pain de lièvre ou du pain d'agace (pain rassi) car c'était du plaisir. Les gosses étaient mis à l'abri dans une cabane faite de glajots pour ne pas avoir froid car le travail se faisait par tous les temps (pluie, vent, neige, ...)

Mamie me dit que bientôt nous allons sentir les naux (osiers), à cette odeur là on sait que le printemps n'est pas loin et pour eux c'était le signe annonciateur de travail !

Mamie me raconte également qu'elle voyait souvent rouge avec le rouge de Falaise (humour) car le "rouge de Falaise" est le meilleur osier pour la fabrication des paniers...

Du coup, elle nous en a donné à Mimi et moi pour en repiquer et c'est vrai que la couleur de ses branches à l'automne et hiver sont d'un beau rouge comme sur la photo ci-contre et cela permettra de perdurer la race et de faire de beaux bouquets.

Vous allez me dire que dans ce récit je vous ai parlé de "triffu" de "batte", de "balot" mais sans vous montrer à quoi cela ressemble...



Dans le prochain épisode, je vous livrerai l'explication de chaque outil en photos... des modèles de création... et surtout l'artiste au travail.


Vous comprendrez facilement à la lecture de ces quelques modestes lignes, pourquoi la qualité de la vannerie française est nettement supérieure à celle "made in China"... juste pour exemple, il est arrivé à Mamie de refaire les anses des paniers achetés dans le commerce, parce que chez nous ce n'est pas fait industriellement, mais avec patience et SAVOIR-FAIRE !

Alors à très bientôt pour la suite...


Publié dans Vannerie artisanale

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N
très intéressant ces explications, je reviendrais pour le 2 ème episode!!!
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Z
<br /> Salut, c'est le but du jeu de vous plaire pour que tout le monde vienne lire la suite... a+<br /> <br /> <br />